Ce fameux traité d’interdiction totale des essais nucléaires est véritablement efficace ! Il n’y a qu’à lire son contenu pour s’en convaincre ! (voir ci-dessous, article paru dans Rouge).

Une charge d’explosif, déclenchant une explosion d’uranium, le tout par 300 m de profondeur sur le site d’essais du Névada, voilà qui est réellement différent de tout ce que nous avons connu avant la signature du traité, signé par Bill Clinton il y a exactement deux ans ! Et après ça on condamne l’Inde et le Pakistan ?

Oui, mais eux ce sont des sauvages, alors…

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DÉSARMEMENT NUCLÉAIRE

Le traité d’interdiction complète des essais nucléaires, l’Inde et le Pakistan

Article paru dans Rouge

Les 11 et 13 mai 1998, l’Inde a effectué respectivement trois et deux essais nucléaires souterrains. Le 28 et le 30, le Pakistan a répondu par cinq et deux essais. Les sanctions économiques immédiates, ainsi que la demande réitérée pour que ces pays signent les traités NPT (Nonproliferation Treaty) et le CTBT (Comprehensive Test Ban treaty) [1] peuvent sembler raisonnables. Pourtant, en y regardant de plus près, on s’aperçoit que la signature de ces traités n’est que poudre aux yeux.

Contrairement aux proclamations des membres du Club (voir encadré) très fermé de ceux qui se sont arrogés le droit de terroriser atomiquement la planète, la déclaration du 9 juin 1998 a eu peu d’écho dans la presse française. Ce jour là, les Ministres des Affaires étrangères du Brésil, de l’égypte, de l’Irlande, du Mexique, de la Nouvelle Zélande, de Slovénie, d’Afrique du Sud et de Suède ont lancé un appel dans lequel, entre autres, ils « reconnaissent que la proposition selon laquelle les armes nucléaires pourraient être retenues à perpétuité et jamais utilisées, accidentellement ou par décision, défie la crédibilité ». Et ils rappellent que les traités de Tlatelolco, Rarotonga, Bangkok et Pelindaba ainsi que celui de l’Atlantique, ont créé des zones dénucléarisées (militairement). Ce qui est une manière effective de refuser l’arme nucléaire.

L’arrêt des armes nucléaires moins urgent que le chimique ? La tout première résolution de l’Assemblée générale des Nations-Unies en janvier 1946, appelait unanimement à la création d’une commission afin de proposer l’élimination, dans chaque pays, de l’arme atomique ainsi que des plus grandes armes de destruction massive. Les armes chimiques et biologiques ont eu leur traité en 1972 et 1993, mais pour le nucléaire rien. Est-ce une coïncidence ?

Les armes biologiques et chimiques sont à la portée des plus pauvres, économiquement et en matière de recherche, les Grands se croyaient protégés par leurs cerveaux ! Ils « oubliaient » que parallèlement l’économie du nucléaire ne suivait pas de chemin différent de celui de tous les autres produits : vente à l’étranger, avec pour seul critère le paiement, accompagnée de prêt d’instructeurs sur place et d’accueil d’étudiants dans le domaine nucléaire en France. Sans oublier la production de plutonium, en particulier à la Hague. Les médias n’ont rien vu.

Après ces essais, scandaleux puisque tiers-mondistes, la presse nous a abreuvés d’analyses. On a même pu lire que la région serait plus sûre après cette démonstration de force : même raisonnement que celui qui a prévalu pour justifier la course à l’arme nucléaire durant la guerre froide, dont on peut voir combien il est faux et dont on constate les effets pervers.

Mais rien ne change et c’est ceux-là même qui n’ont cessé de se tromper qu’on appelle à se prononcer devant la preuve palpable de leur erreur et leur incompétence multidécennale ! Dans la même veine, c’est un épanchement général en faveur de la signature du TNP et du CTBT qui s’en est suivi. Pourtant, Le Monde, dans une lucidité aussi étonnante que nouvelle, découvre, dans un éditorial du 30 mai 1998, que le CTBT est « quasi mort-né ». Devait-on attendre ces essais asiatiques et leur cohorte d’irradiés et de contaminés [2] pour s’en apercevoir ? à sa décharge, l’aveuglement et la désertion générale après la série d’essais nucléaires français en 1995 suivie de la signature du CTBT. Presque tout le monde s’est alors empressé de quitter le navire de la lutte contre les essais et les armes nucléaires. Même Greenpeace, bien que historiquement né sur la base de la lutte contre les essais nucléaires, avait licencié tous ses chargés de campagne nucléaire militaire de par le monde et a dû en réembaucher une en extrême urgence pour faire une déclaration qui se tienne après les essais asiatiques…

Lecture attentive du CTBT

En réalité il suffit de lire ce traité, dont le projet de loi français est paru en français et était donc accessible à tout individu, a fortiori tout journaliste, pour se rendre compte que celui-ci est dans la droite ligne de toutes les décisions prises en la matière : conservation des avantages acquis par les puissances du club fermé, interdiction aux autres de rejoindre ce club.

Dans l’exposé des motifs on apprend, en ce qui concerne la surveillance internationale, qu’« un premier accord a été signé […] le 18 avril 1996 à Paris avec la Mongolie et prévoit l’installation en Mongolie, par le laboratoire de détection et de géophysique du Commissariat à l’énergie atomique, d’une station digitale de détection sismique avec son système de retransmission des données par satellite. De semblables accords sont en négociation avec l’Indonésie, la Côté d’Ivoire et une dizaine d’autres états. »

Dans le préambule du traité, les signataires remarquent « que les Parties au Traité de 1963 […] ont exprimé le vœu d’assurer l’arrêt de toutes les explosions nucléaires expérimentales d’arme nucléaire […]. » L’article IX traite de la durée et du retrait des états signataires : « Chaque état partie, dans l’exercice de sa souveraineté nationale, a le droit de se retirer du présent Traité s’il juge que des événements extraordinaires en rapport avec l’objet du Traité ont compromis ses intérêts suprêmes… Le retrait s’effectue en adressant avec un préavis de six mois une notification à tous les autres états parties […] ».

En ce qui concerne la France, le traité précise que le laboratoire de référence en ce qui concerne les radionucléides est celui du Commissariat à l’énergie atomique de Montlhéry. Or le seul laboratoire national ayant référence en ce qui concerne la radioactivité en France, dépendant du ministère de la Santé est l’OPRI (Office de protection contre les rayonnements ionisants), nouveau nom du SCPRI (Service central…). Il est également la référence pour l’Europe de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) en la matière. Certes le SCPRI est connu pour avoir « stoppé » les nuages radioactifs de Tchernobyl à la frontière, mais en tout état de cause il est curieux de lui voir substitué un organisme militaire donc lié par le secret défense.

En fin de compte, on se rend aisément compte qu’avec ce traité, non seulement la poursuite des essais de simulation de l’arme nucléaire est autorisée, mais encore que les membres du Club peuvent consolider leur présence sur des lieux géopolitiques militaires, le CEA, par exemple, étend son emprise dans le domaine militaro-nucléaire par une présence dans des pays où il n’y était pas encore. Pays du tiers-monde, qui ne pourront de ce fait qu’agir dans les intérêts de la France, pour laquelle le chantage sera aisé. Quant à ceux où la France est déjà présente, leur indépendance ne sera jamais d’actualité.

L’alibi de la nouvelle colonisation officielle est la protection de la planète… par ceux qui la mettent en danger ! De plus, comment « oublier » qu’il suffit d’aviser - pas de demande, pas de sanction - avec six mois d’avance pour utiliser la bombe atomique ?

L’Inde et la Pakistan peuvent signer le CTBT les yeux fermés : ils pourront bombarder en toute légalité à condition qu’ils préviennent six mois à l’avance…

Politique et stratégie à courte vue. Les cinq autoproclamés Grands n’ont-ils pas pensé que d’autres pays auraient la bombe atomique, juste un peu plus tard ? C’est pourtant ce que la France a fait : De Gaulle a développé la bombe atomique pour que les Américains l’écoutent enfin.

Après ses premiers essais en 1974, a-t-on imaginé que l’Inde s’arrêterait ? Après la décrépitude du bloc de l’Est les cerveaux ont fui, ne pouvait-on pas le prévoir ? La fabrication des armes atomiques a des conséquences sur l’environnement, les êtres vivants et les hommes qui dépassent l’imagination humaine ; les stratèges maîtres du monde n’avaient pas les neurones pour y penser ?

La France a signé le CTBT Que signifiait pour la France effectuer une série d’essais juste avant de signer ? C’était pourtant un bel indice. On n’investit pas de cette manière en prévoyant et annonçant l’inutilité de tout cela. Sans même lire le traité, on pouvait donc savoir, au moment même ou Chirac, après les essais de 1995, annonçait que la France allait signer le CTBT que celui-ci n’avait aucune valeur contraignante, ni dans la recherche de nouvelles armes atomiques - par simulation par exemple - ni dans l’obligation de ne pas les utiliser.

Pour un véritable avenir sans armes nucléaires il faut à tout prix arrêter de brandir en référence ce traité hypocrite, mais inciter à un autre, qui réponde réellement à la toute première résolution de l’Assemblée générale de l’ONU en janvier 1946 : l’interdiction complète de recherche sur les armements nucléaires et le démantèlement de celles qui existent.

Bon anniversaire, Perline !

L’arme nucléaire sur la planète

En plus les cinq pays officiellement nucléarisés, états-Unis, Grande Bretagne, France, Russie et Chine, on doit dorénavant compter avec l’Inde et le Pakistan, alors qu’Israël reste dans la catégorie des pays nucléarisés non déclarés.

L’Iran, l’Irak, la Corée du Nord et la Libye sont surveillés et ont été stoppés dans leur élan.

L’Algérie, l’Argentine, le Brésil et l’Afrique du Sud ont abandonné officiellement leur programme nucléaire.

Le Bélarus, la Kazakhstan et l’Ukraine ont hérité des têtes nucléaires entreposées à l’époque par l’URSS après que celle- ci a été démantelée.


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[1En français on devrait dire TICE (Traité d’interdiction complète des essais nucléaires) mais seuls les documents officiels l’appellent de cette manière, alors que le NPT se dit effectivement TNP (Traité de non prolifération).

[2Dès le 17 mai 1998, on apprend l’apparition, juste après la deuxième série d’essais, du syndrome de contamination radioactive (saignements de nez, irritation de la peau et des yeux, vomissements et diarrhées, etc.) dans le village de Khetolai, au Rajasthan, proche du lieu des essais (Agence Reuters).